Anne Dardelet Sheybani – Auparavant Head of Philanthropy & Engagement chez Edmond de Rothschild, actuellement Sustainability & Impact Project Manager chez Schroders Capital
40 ans – 40 femmes * Thème: Solidarité
D’origine française, Anne Dardelet a grandi à Cergy-Pontoise dans le Val d’Oise. Diplômée de l’ESSEC Business School, Anne est avocate en droit public économique.
Au quotidien, elle aspire à contribuer à la création d’un avenir plus durable, plus juste et plus démocratique. Ce sont sa passion et ses objectifs qui l’ont amenée à travailler dans divers secteurs tels que l’économie urbaine, l’entrepreneuriat social, l’investissement d’impact, la politique, les affaires publiques, les entreprises familiales dans les secteurs du recyclage, du commerce et de la finance.
Dans le cadre de notre projet #40ans40femmes, c’est un plaisir pour nous de vous permettre de rencontrer cette brillante personnalité. Nous vous invitons à découvrir son interview complète ci-dessous.
Qui êtes-vous en trois mots ?
Je suis française, j’ai grandi à Cergy-Pontoise dans le Val d’Oise dans une de ces grandes utopies urbaines qu’on appelle villes nouvelles. Une ville au vert, marquée par une jeunesse pleine d’envie, et une grande diversité sociale et culturelle. Après une classe préparatoire, je suis entrée en école de management, en partie parce que l’école était complètement pionnière à l’époque dans les sujets d’innovation sociale… et parce qu’alors je faisais compagne pour les municipales ! J’ai poursuivi par un diplôme de droit public économique avec l’idée que le droit deviendrait un moyen de mettre plus vite les entreprises au service du bien commun. Par un grand concours de circonstances je suis arrivée à Genève où j’ai rencontré mon mari et nous vivons depuis 6 mois à Londres. Ce qui me caractérise c’est, je crois, d’être capable de créer des opportunités et des ponts entre des mondes parfois éloignés – l’entreprise et le politique, le lucratif et le non-lucratif…
Quels sont les ingrédients de votre réussite ?
En classe préparatoire, on a tous un surnom ; le mien c’était Activiste. Je pense que ça me résume assez bien : convictions, confiance – celle de mes mentors et confiance en l’avenir, prise de risque.
Que feriez-vous différemment ?
J’écouterais plus en cours de finance ! Si on m’avait dit qu’un jour je travaillerais dans les services d’investissement. Et peut-être une année de service militaire, pour apprendre la discipline…
Quel est le meilleur conseil reçu ou celui que vous donneriez ?
Savoir décaler le regard pour garder une vision globale des situations, et se souvenir que l’environnement est toujours plus fort que nous. Aujourd’hui, y compris dans le secteur financier, la transparence, la durabilité et l’impact ne sont plus une option, c’est juste le sens de l’histoire. On peut résister et se dire que c’était mieux avant, ou on peut choisir de devenir le futur champion de cette nouvelle discipline.
Quel est selon vous le changement le plus important que reste à opérer pour la progression professionnelle des femmes ?
Il y en a beaucoup. L’inégalité salariale en est un des symptômes les plus choquants. Mais si l’on veut attaquer l’injustice à la racine et embarquer les hommes dans cette transformation, je pense qu’il y a deux combats aujourd’hui : rendre la garde d’enfants moins onéreuse ; instaurer un congé obligatoire pour le second parent. Si on gagne ça, on opéré une petite révolution !
Comment le mot Solidarité résonne chez vous, qu’évoque-t-il ?
Pour moi, ça évoque surtout la joie ! Les sciences sociales le prouvent : donner rend heureux. Alors allons-y !
Quels sont les raisons qui vous incitent à vous engager dans le domaine de la Solidarité ?
A l’origine, c’est une histoire d’ADN familial ; dans ma famille, nous sommes tous marqués par les valeurs du scoutisme et de la justice sociale. Mais l’urgence face au dérèglement climatique et l’explosion des inégalités, révélées par la crise sanitaire, ont encore renforcé mon engagement. J’ai la chance de pouvoir agir à mon échelle, là ou je pense qu’on peut avoir un impact sur le système, alors je le fais.
Comment voyez-vous évoluer le monde de la Solidarité dans les années à venir ?
Le monde de la Solidarité va continuer à évoluer pour répondre aux besoins des plus vulnérables, pour lesquels le marché et le politique n’auront jamais de réponse. Mais le monde de la Solidarité, le non-lucratif, la philanthropie, ne peuvent rien si nous ne faisons pas en même temps évoluer notre manière de créer de la richesse et de la distribuer. La transition écologique et sociale sont en train de forcer la lente et nécessaire convergence entre le monde de l’entreprise et celui de la Solidarité car une entreprise qui ne tient pas compte de toutes ses parties prenantes n’aura pas sa place dans le monde vers lequel nous allons. Il va donc falloir encore plus de personnes curieuses, capables de créer des ponts entre l’entreprise et la société, d’inventer de nouveaux modèles d’affaires, de coopération, de mesure de la performance.
Quel est le message que vous aimeriez partager avec les femmes autour de la Solidarité ?
La société à besoin de plus de femmes et de personnes issues de la diversité dans les postes à responsabilité – notamment en finance, dans le droit, en politique – pour devenir plus inclusive. Inclusive au sens fort d’une société où chacun peut être un contributeur actif indépendamment de son âge son genre, son origine sa religion, son orientation sexuelle. Quand les femmes prennent le pouvoir, les institutions deviennent plus inclusives… et plus performantes. Et c’est plus agréable pour tout le monde !
Ensuite, soyons toujours plus solidaires entre nous. Nous représentons plus de 50% de la population : que faisons-nous de cette majorité silencieuse? Nos représentations personnelles, nos cultures d’entreprises, la société ne sont pas organisées pour que nous puissions aller réseauter entre femmes au pub à 17h ou au match de foot le week-end. Si nous n’inventons pas nos propres espaces pour nous reconnaître, nous faire la courte échelle pour le prochain poste a responsabilités ou proposer des transformations, personne ne le fera pour nous. J’ai eu la chance de rencontrer de ces femmes puissantes qui savent créer de telles opportunités : la meilleure manière de les remercier c’est de prendre le relais !